I - DVM généralités
I - Durée de vie microbiologique : notions générales
1. Définition de la durée de vie microbiologique⚓
La durée de vie d'un aliment est définie comme la période durant laquelle l'aliment répond à des spécifications concernant sa sécurité (innocuité) et sa salubrité (absence d'altération), dans les conditions prévues de stockage et d'utilisation, y compris par le consommateur.
Le règlement (CE) N°2073/2005 définit la durée de conservation comme étant la période précédant la date limite de consommation des produits ou la date de durabilité minimale, telles que définies respectivement aux articles 9 et 24 du règlement (UE) n°1169/2011.
La durée de vie, complétée par les conditions d'entreposage appropriées (essentiellement la température de conservation) et d'usage prévu, indique jusqu'à quelle date un aliment conserve ses propriétés spécifiques, sans devenir préjudiciable à la santé et/ou subir d'altérations inacceptables.
Elle débute et se termine par des dates (date limite de consommation ou date de durabilité minimale) établies sous la responsabilité des fabricants. La durée de vie dépend des caractéristiques microbiologiques et physico-chimiques de la denrée, qui résultent de la nature des ingrédients, du procédé de fabrication, du type de conditionnement et des modalités de conservation. D'un point de vue plus général, si les aspects microbiologiques ne représentent pas le facteur limitant, la fin de la durée de vie est fixée en fonction de l'apparition de modifications de différentes natures, de détériorations biochimiques ou de dégradations nutritionnelles.
Cette instruction est axée sur la durée de vie microbiologique (DVM), c'est à dire la « période à partir de la date d'origine J0 pendant laquelle d'aliment reste dans les limites microbiologiques fixées », selon la norme NF VOI-0022.
Ces limites sont à définir dans le cadre de l'article 14 du Reg CE 178/2002, interdisant la mise sur le marché d'aliments considérés comme dangereux, c'est-à-dire préjudiciable à la santé, et/ou impropre à la consommation en raison de son caractère inacceptable pour la consommation humaine, compte tenu de l'utilisation prévue, pour des raisons de contamination d'origine externe ou autre, ou de dégradations de type putréfaction, détérioration ou décomposition. Certaines de ces limites microbiologiques sont obligatoires, d'ordre réglementaire, telles que spécifiées dans le Reg CE 2073/2005 modifié.
Ainsi, la DVM des aliments doit être définie à l'égard :
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2 -Information à communiquer dans le cas où les denrées sont échangées entre deux exploitants du secteur alimentaire (hors collectivités)⚓
Le règlement (CE) n°1169/2011 (article 8, point 8) précise que les exploitants du secteur alimentaire qui fournissent, à d'autres exploitants, des denrées alimentaires qui ne sont pas destinées au consommateur final ou aux collectivités veillent à fournir à ces autres exploitants du secteur alimentaire suffisamment d'informations Ieur permettant, le cas échéant, de respecter les obligations qui Ieur incombent en matière d'information sur les denrées alimentaires.
Parmi ces informations, il peut s'agir
d'une date imposée par la réglementation pour certains produits d'origine animale ou végétale (ex : date de ponte pour les œufs, date de production3 et de congélation (si elle est différente de la date de production) pour les denrées alimentaires d'origine animale congelées...) ;
d'une date de production non imposée réglementairement (ex : date de filetage pour les produits de la pêche réfrigérés).
Il peut également s'agir d'informations de nature à garantir des conditions d'utilisation adaptées des denrées, notamment très périssables, telles qu'une date limite d'utilisation (DLU) ou une date d'utilisation recommandée (DUR) fixée par le fournisseur ou par un cahier des charges : cette durée de conservation, fondée sur la durée de vie microbiologique de la denrée, doit faire l'objet d'une validation par le fournisseur de la denrée initiale.
Ces informations font partie des éléments à considérer par le 2eme opérateur pour garantir de bonnes conditions d'utilisation de la denrée et valider la durée de vie de son produit fini : elles doivent être intégrées dans le plan de maîtrise sanitaire (PMS). Dans le cas où le second opérateur utiliserait la denrée au-delà de la DLU ou de la DUR, sa responsabilité pourra être engagée si, compte tenu des obligations générales qui sont les siennes, il n'a pas pris en compte ce dépassement dans son analyse des dangers validée. Par ailleurs, un tel dépassement doit être limité et justifié en tenant compte des caractéristiques physico-chimiques et biologiques du produit, du type de procédé de fabrication appliqué sur la matière première et doit se faire avec une validation stricte de la DLC du produit commercialisé.
3 - Informations à communiquer dans le cas où les denrées sont destinées au consommateur final et aux collectivités⚓
3.1 - Cas des denrées alimentaires préemballées⚓
Une denrée alimentaire préemballée est définie dans le règlement (UE) n°1169/2011 (Article 2 point 2e) comme étant « l'unité de vente destinée à être présentée en l'état au consommateur final et aux collectivités^ constituée par une denrée alimentaire et l'emballage dans lequel elle a été conditionnée avant sa présentation à la vente [...) ; cette définition ne couvre pas les denrées emballées sur le lieu de vente â la demande du consommateur ou préemballées en vue de leur vente immédiate’ ».
Pour ces aliments préemballés destinés au consommateur final et aux collectivités, la durée de vie se traduit par une date inscrite sur l'emballage qui peut être soit une date limite de consommation (DLC), soit une date de durabilité minimale (DDM)^. Cette date est définie par le fabricant ou le conditionneur final.
La durée de vie est établie pour le produit tel que commercialisé et n'a plus de signification sur le produit ouvert par le consommateur ou la collectivité. Cependant, des recommandations peuvent être utilement proposées par le fabricant ou le conditionneur final sur les conditions de conservation de d'aliment après ouverture de l'emballage (température, durée maximale de conservation, utilisation attendue par le consommateur).
Par ailleurs, la détermination d'une durée de vie secondaire (par exemple dans le cas de produits découpés, tranchés et reconditionnés) est de la responsabilité de l'exploitant effectuant l'opération de déconditionnement/reconditionnement : cette durée ne peut en aucun cas excéder la durée de vie initialement définie par le fabricant, sauf si un traitement susceptible de réduire le nombre de microorganismes présents est appliqué par le deuxième opérateur (exemple : déconditionnement, cuisson et reconditionnement).
Notes : aux termes du règlement (CE) n°853/2004 (annexe III, section VII, chapitre VII), les colis de coquillages (ex : bourriches, sacs) peuvent déroger à l'apposition d'une DDM. Celle-ci peut être remplacée par la mention « Ces coquillages doivent être vivants au moment de l'achat ». Une date de conditionnement est cependant exigée ; |
a - Date limite de consommation (DLC)
La DLC désigne la date à laquelle la durée de conservation d'une denrée alimentaire préemballée prend fin. Passé cette date l'aliment ne doit plus être consommé. C'est au professionnel de déterminer si la date à apposer sur son produit est une DLC ou une DDM.
Selon le règlement (UE) n°1169/2011, les DLC sont fixées pour les denrées microbiologiquement très périssables « susceptibles de présenter, après une courte période, un danger immédiat pour la santé des consommateurs ».8
Cette instruction privilégie une approche globale pour la détermination des DLC, en s'appuyant sur la définition d'un aliment « dangereux » au sens de l'article 14 du règlement (CE) n°178/2002 et, qui peut être soit « préjudiciable à la santé », soit « impropre à la consommation » :
Afin d'étudier le caractère « préjudiciable à la santé », il doit être tenu compte
de l'effet probable immédiat et/ou à court terme et/ou à long terme de cette denrée alimentaire sur la santé non seulement d'une personne qui la consomme, mais aussi sur sa descendance ;
des effets toxiques cumulatifs probables ;
des sensibilités sanitaires particulières d'une catégorie spécifique de consommateurs lorsque la denrée alimentaire lui est destinée.
Il est important de tenir compte des populations à risques susceptibles de consommer la denrée alimentaire. Ainsi, doivent être pris en compte les toxines et les micro-organismes pathogènes susceptibles d'être présents dans l'aliment ou qui peuvent se développer pendant sa durée de vie jusqu'à le rendre préjudiciable à la santé. Dans tous les cas, il est essentiel que les exploitants prennent en compte, sur la base de l'analyse des dangers faite dans le cadre de l'application des principes HACCP, le développement des micro-organismes pathogènes pouvant être présents dans les aliments, aussi bien du fait d'une contamination initiale que d'une recontamination après un traitement assainissant. Il convient en particulier de prendre en compte Listeria monocytogenes pour les aliments réfrigérés prêts à être consommés, pour lesquels il existe un critère microbiologique quantitatif réglementaire à respecter jusqu'à la fin de la durée de vie, et pour lesquels la démonstration du respect de ce critère doit être réalisée par l'exploitant.
Note : pour les produits fabriqués à partir d'espèces de poissons associées à une grande quantité d'histidine et les sauces obtenues par fermentation des produits de la pêche, le règlement (CE) n°2073/2005 définit un critère de sécurité supplémentaire, basé sur la teneur en histamine. |
Afin d'étudier le caractère « impropre à la consommation », il doit être évalué si cette denrée alimentaire peut devenir inacceptable pour la consommation humaine (putréfaction, détérioration ou décomposition liée à une contamination microbiologique), compte tenu de l'utilisation prévue par le consommateur.
Des micro-organismes utilisés comme indicateurs d'hygiène des procédés et des micro-organismes d'altération sont aussi à considérer s'ils peuvent rendre la denrée alimentaire inacceptable à la consommation (ex : produits altérés, putréfiés, moisis...). Des critères microbiologiques sectoriels peuvent aider à définir les limites microbiologiques à fixer (cf. guides de bonnes pratiques d'hygiène et d'application des principes HACCP (GBPH) validés, critères des interprofessions, critère d'hygiène des procédés de l'ANSES...).
La DLC est définie par le conditionneur à partir de la durée de vie microbiologique en intégrant, dans la majorité des cas, une marge de sécurité destinée à prendre en compte les conditions de conservation raisonnablement prévisibles. L'exploitant a une obligation de résultat.
Les denrées alimentaires instables d'un point de vue microbiologique nécessitent l'utilisation de températures réfrigérées à tous les stades de la chaîne alimentaire, afin d'en assurer Ieur sécurité et Ieur salubrité.
b - Date de durabilité minimale (DDM)
Le règlement (UE) n°1169/2011 précise qu'une DDM doit être définie pour les produits préemballés non visés par une DLC. La DDM d'une denrée alimentaire est la date jusqu'à laquelle cette denrée alimentaire conserve ses propriétés spécifiques dans des conditions de conservation appropriées.
Les DDM sont associées à des produits ne permettant pas la croissance des micro-organismes pathogènes et des micro-organismes indicateurs d'hygiène et/ou d'altération dans les conditions raisonnablement prévisibles de conservation et d'utilisation préconisées. Elles concernent généralement des produits à durée de vie longue, mais une durée de vie longue n'est pas obligatoirement synonyme de DDM. La DDM correspond à la durée de conservation durant laquelle le produit conserve ses caractéristiques organoleptiques (aspects, odeur, texture, flaveur) et nutritionnel les. Quand cette date est dépassée, des altérations organoleptiques sont susceptibles d'apparaître sans rendre l'aliment préjudiciable à la santé. Il convient de s'assurer que des éléments stabilisant le produit (caractéristiques du produit, efficacité du procédé de fabrication.) sont disponibles pour justifier le choix d'une DDM.
Une DDM est définie, par exemple, pour les produits tels que les conserves, les produits surgelés, les produits stérilisés UHT, les produits secs, etc.
L'EFSA a établi un guide afin d'aider les exploitants du secteur alimentaire à décider de l'application d'une date limite de consommation ou d'une date de durabilité minimale selon les produits.
Cet outil est structuré comme un arbre de décision comportant une série de questions auxquelles les exploitants du secteur alimentaire peuvent répondre, l'objectif étant de les aider à décider si une date limite de consommation ou une date de durabilité minimale est requise. Cet arbre de décision est présenté en annexe I.
Néanmoins, en France, on peut également trouver des produits tels que les charcuteries sèches, les fromages affinés, les produits laitiers fermentés (par ex. les yaourts) pour lesquels une DDM est apposée (au lieu d'une DLC comme le suggère l'arbre de décision de l'EFSA). Dans le cadre de la lutte contre le gaspillage alimentaire par exemple, les professionnels peuvent souhaiter apposer des DDM plutôt que des DLC sur des denrées d'origine animale stables dans le temps de par leur composition (pour les yaourts conditionnés de façon hermétique par exemple) en incitant le consommateur à évaluer la qualité du produit avant de le consommer. Cependant, l'apposition d'une DDM dans ce contexte doit conduire le professionnel à gérer cette durée de vie comme une DLC en effectuant une démarche de validation qui prendra en compte une marge de sécurité suffisante pour intégrer un délai au -delà de la DDM apposée pendant lequel un consommateur pourrait raisonnablement utiliser le produit dans le respect des conditions de conservation définies figurant sur l'étiquetage.
Il est important de rappeler que les opérateurs ne mésestiment pas l'impact de l'apposition d'une DDM à la place d'une DLC pour ne pas entrainer une augmentation du risque sanitaire pour le consommateur.
3.2 - Cas des denrées alimentaires non pré-emballées⚓
En application des dispositions de l'article 3 du règlement (CE) n°2073/2005, les exploitants du secteur alimentaire responsables de la fabrication et/ou de la commercialisation de denrées alimentaires non pré- emballées doivent être en mesure de justifier de la durée de vie microbiologique des denrées.
Dans le cas de denrées vendues à la coupe après déconditionnement, la détermination d'une durée de vie secondaire est de la responsabilité de l'exploitant effectuant l'opération de déconditionnement : cette durée ne peut en aucun cas excéder la durée de vie initialement définie par le fabricant.
Dans le cas de denrées fabriquées et remises sous forme non pré-emballée, les exploitants doivent conduire des études de durée de vie afin de garantir que les denrées restent dans les limites microbiologiques fixées pendant toute Ieur durée de conservation.
Note : Il est admis que les produits de la pêche (poissons, crustacés, céphalopodes) frais, ainsi que les cuisses de grenouilles, conditionnés dans des caisses polystyrène et vendus aux commerces de détail, dont les collectivités, ne sont pas considérés comme des denrées préemballées au sens du règlement (UE) n° 1169/20J1. Dès Iors, l'obligation d'indiquer une DLC ne s'applique pas. |